25 05 2019

23/05/2019 – Bien-être au travail: Victime, manager, RH, collègue… Comment gérer la reprise après un burn-out ?, par Yves Bassens – Administrateur de la FIRPS

À l’occasion de la conférence internationale sur le bien-être au travail, « 20 Minutes » liste des conseils pour ménager la reprise que l’on soit victime, manager, RH, collègue ou conjoint.

« Le burn-out, c’est comme un portable utilisé à outrance. Au bout d’un moment, il s’éteint », explique Aude Selly, une responsable RH qui a raconté son effondrement et sa reconstruction dans Quand le travail vous tue* . Et « la reconstruction, c’est progressif », ajoute-t-elle. Sauf qu’une fois que l’on tient sur ses deux jambes et que l’arrêt maladie est terminé, il faut reprendre le chemin du bureau. Or, quand on a traversé un syndrome d’effondrement professionnel, il est particulièrement difficile de retrouver son environnement de travail avec le sourire, puisque c’est justement celui-ci qui a tout fait basculer… Pour assurer une reprise sans rechute, voici quelques conseils quand on est…

… Soi-même victime d’un burn-out
En général, un arrêt long a été mis à profit pour faire le point sur les causes de cet effondrement… et sur les bonnes résolutions à tenir. « Les victimes de burn-out sont souvent des piliers de l’entreprise : investies, solidaires, et qui ont du mal à exprimer leurs difficultés, analyse Aude Selly. La première chose à faire quand on revient, c’est donc d’apprendre à dire non, de poser des limites… sans culpabiliser ». Pour être sûr d’être bien solide, le salarié peut demander une pré-visite de reprise avec le médecin du travail.

« C’est souvent l’organisation du travail qui est toxique, souligne François Baumann, médecin généraliste spécialisé dans la souffrance au travail et auteur de Eliminer la souffrance au travail **. Il faut donc essayer de reprendre dans un autre secteur, une autre équipe, pour ne pas repartir dans le même cercle vicieux. » Attention aux signes de rechute, conseille également le médecin. Car dans 30 à 40 % des cas, la reprise va se solder par un nouveau burn-out, souvent plus terrible. « Le premier signal, c’est en général les troubles du sommeil », avertit Aude Selly, qui, après son burn-out, s’est reconvertie en consultante spécialiste de l’épuisement professionnel. « Si on voit réapparaître ou s’accentuer les crises de larmes, d’angoisse, dès les premiers signes, il faut se faire arrêter », reprend le Dr Baumann. Il assure qu’il faut garder une activité sportive ou ludique à côté, qui sert de dérivatif. « Le risque de rechute intervient souvent entre trois et six mois après la reprise, surtout si on n’a pas consolidé l’un des piliers de la bonne santé, à savoir le sommeil, l’alimentation et l’activité physique », renchérit Sabine Bataille, directrice du Reseau Reconstruction post burn-out, sociologue et consultante.

… Le manager
Il est primordial de marcher main dans la main avec son manager. Qui, dans l’idéal, peut redéfinir les contours du poste de cette personne fragilisée, vérifier qu’il a les moyens de l’effectuer. « Le salarié, qui a souvent perdu confiance en lui, a besoin de savoir ce qu’on attend de lui, constate Sabine Bataille, auteure de Réussir son retour au travail ***. Mes clients me disent qu’ils sont rassurés par des consignes mono tâche, des dossiers plus simples et des postes moins exposés. » Mais le manager direct a aussi une responsabilité pour préparer toute l’équipe. « Ce qui a énormément d’impact dans le milieu du travail, c’est la réintégration dans l’équipe, qu’elle soit nouvelle ou ancienne, assure Aude Selly. Le manager peut créer des espaces de discussions qui permettent une expression facile. » Ou miser sur le team building : un cours de yoga, un déjeuner de service de temps en temps, cela permet de ressouder les troupes et d’évoquer les problèmes. Sans pour autant imposer le petit dej chaque jour, qui risque de donner l’impression au salarié d’être surveillé…
« Le manager bienveillant doit aussi être accompagné, complète Sabine Bataille. Car une rechute, c’est un échec pour le salarié, mais aussi pour son supérieur. Il arrive souvent que ce dernier culpabilise, d’où l’intérêt de lui proposer l’appui d’experts, de coachs extérieurs ou au moins des points réguliers pendant trois mois avec les RH. »

… Les ressources humaines
Le service des ressources humaines peut évidemment jouer un rôle essentiel. « Il faut préparer en amont son retour en ayant une approche multidisciplinaire », assure Aude Selly. Qui conseille de mettre en place un conseil de prévention avec le manager, le service RH, la médecine du travail, le représentant du personnel, et idéalement le salarié. Une piste explorée chez nos voisins belges. « La loi oblige les entreprises à mettre en place des trajets de retour à l’emploi tripartites avec le médecin du travail ou le médecin traitant, l’entreprise et le salarié », explique Yves Bassens, trésorier de la Fédération des intervenants en risques psychosociaux (FIRPS). En France, la loi est moins précise, mais le Code du travail précise que « l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ». Une fois le diagnostic sur les causes posé et partagé, encore faut-il que l’entreprise fasse son possible pour trouver des solutions. Qui sont multiples : rendre le poste plus ergonomique, proposer un mi-temps thérapeutique, envisager davantage de télétravail, faire un bilan de compétence, une formation continue, réfléchir à un congé individuel de formation, parfois même proposer une pension d’invalidité ou la reconnaissance du statut de travailleur handicapé…

… Un collègue
« Ce dont j’ai le plus souffert, et qui m’a poussé à faire une tentative de suicide, c’est l’isolement, témoigne Aude Selly. Un ami dans l’entreprise, ça change tout. » Après des mois d’absence, en plus de l’angoisse de retomber dans un cercle délétère, on craint parfois le jugement des collègues. Et leur curiosité. « De la part des victimes, il y a deux approches en général : celles qui veulent qu’on fasse comme si de rien n’était, et d’autres très touchées par un accueil positif, analyse Sabine Bataille. Mieux vaut donc éviter les questions impudiques et attendre que la personne aborde le sujet. »
Pour ménager un bon accueil, certains « peuvent épauler leur collègue en demandant comment ils peuvent l’aider », reprend le médecin. Proposer un café pour expliquer les changements d’organisation, lui montrer un nouveau logiciel, suggérer une pause déjeuner en dehors des locaux sont autant de petites attitudes qui seront bénéfiques.
De même, le collègue proche peut se montrer vigilant aux premiers signes de rechute. « L’observation peut se faire discrètement, sans être sur son dos », avise Sabine Bataille. Mais dès qu’un collègue perçoit que la personne prend de moins en moins de plaisir au travail, arrive et part fatiguée, qu’elle développe une addiction, il peut proposer une écoute sincère.

… Le conjoint
Souvent, c’est le premier cercle qui alerte. Encore faut-il trouver les mots… « Attention à ne pas être trop surprotecteur et à laisser à l’autre le défi de reprendre ses marques, confie Sabine Bataille. Il faut donc lui dire « tu vas y arriver, tu as le temps », plutôt que « si tu n’y arrives pas, demande-moi ». Il faut surtout réaffirmer des messages d’amour et dire que le plus important, c’est la santé, pas un job ! » Autre conseil : « Ne surtout pas culpabiliser la personne, prévient Aude Selly. Et c’est important de la convaincre d’aller voir un professionnel. » Ce qui ne va pas forcément de soi. « La majorité des victimes de burn-out n’ont pas d’antécédents psychiques. Elles vont souvent minimiser le problème et refuser d’aller voir un psy », reprend-elle. Mais que ça soit un suivi par un coach, un médecin, un hypnothérapeute ou un sophrologue, mieux vaut l’encourager à prendre soin d’elle.
« Les gens qui sortent d’un burn-out ont besoin de bienveillance, de compréhension et d’écoute, prévient François Baumann. C’est la maladie de la non-reconnaissance. »
Au-delà de l’écoute, le ou la conjoint(e) a, par ailleurs, un rôle à jouer sur les tâches domestiques. Le but : mieux répartir responsabilités et charge mentale à la maison.

* Quand le travail vous tue, Maxima, 2013, 14,80 €.
** Eliminer la souffrance au travail, Josette Lyon, mai 2019, 14,90 €.
*** Réussir son retour au travail, Interéditions, 2017, 22,90 €.

Article paru le 23/05/2019, sur 20minutes.fr

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