La mesure, encadrée, doit permettre aux entreprises très touchées par l’absentéisme de mieux prévenir les risques professionnels.
Lombalgies, troubles musculo-squelettiques ou psychosociaux… Face à l’augmentation des pathologies liées aux conditions de travail, l’Assurance maladie a lancé une expérimentation auprès de grandes entreprises anormalement touchées par l’absentéisme pour les inciter à mieux prévenir les risques professionnels.
En les informant des motifs d’arrêts maladie de leurs salariés – dont l’anonymat est préservé, car le motif d’un arrêt de travail ne doit pas être divulgué à l’employeur – et en confrontant leur situation à celle de firmes « comparables », elle espère pousser ces entreprises « à mettre en oeuvre des actions de prévention » et « à réduire certains facteurs de risques », selon un communiqué.
Depuis novembre, « cinq entreprises ont été visitées, à Amiens, Bourg-en-Bresse, Marseille, Grenoble et l’une sur la Côte d’opale », précise Laurent Bailly, en charge du programme, dans un entretien publié mercredi 24 janvier sur le site de « l’Express ».
« Inadmissible »
Mais l’initiative inquiète certains membres du corps médical, relève « Le Monde ».
« Inadmissible, inapplicable… Pensez-vous que les patients acceptent des AT [arrêt de travail] si l’employeur est au courant d’un motif psy pour un arrêt ? C’est toujours stigmatisant, nous courons à la catastrophe », a tweeté le docteur Goltman, psychiatre.
« Le plus grave est qu’il y ait un décret qui permette à l’Assurance-maladie de se passer de l’autorisation de la CNIL [Commission nationale de l’informatique et des libertés] », déclare le président de la Fédération des médecins de France, Jean-Paul Hamon.
« Le traitement de ces données est autorisé par le Code de la Sécurité sociale », souligne néanmoins l’Assurance maladie dans son communiqué. Les statistiques « partagées avec l’entreprise sont évidemment anonymes » et ne « concernent que des entreprises » de plus de 200 salariés « afin que le lien entre les causes d’absence et les salariés soit impossible ».
Seuls « les arrêts pour troubles musculo-squelettiques (TMS), les lombalgies (même si elles peuvent relever d’un TMS), et ceux liés aux risques psychosociaux (RPS) » sont ciblés, précise par ailleurs Laurent Bailly.
« Les partenaires sociaux ont donné le feu vert pour cette expérimentation, convaincus par les garanties de secret médical » apportées, assure-t-il. Selon lui, l’Assurance maladie vérifiera « dans six mois, si des actions ont bien été mises en place », suivant une « logique ‘d’offre de service’ et pas ‘de contrôle’ ».
Elle décidera après « évaluation » d’étendre ou non le dispositif à « plus d’entreprises », selon le communiqué.
Source : nouvelobs.com – article paru le 27/01/2018